Photo : Heman Sorgeloos

LA DANSE INCLUSIVE POUR RÉINVENTER L’ESPACE PUBLIC

Le Studio explore le rapport entre l’espace, le rythme, le corps et la ville dans sa pratique d’architecte urbaniste. La danse est un thème de recherche-action dans son architecture, son urbanisme et son design. La danse comme outil pour dessiner l’espace public, comment et pourquoi ?

L’espace public pour tous et toutes est un débat qui monte en puissance depuis une décennie, faisant de l’égalité des sexes dans l’espace public l’objet de multiples études. L’usage de l’espace public n’est ni neutre ni égalitaire. Bien que les collectivités affichent leur engagement en faveur d’une plus grande parité hommes-femmes, les cahiers des charges ou appels à projets d’aménagement urbain semblent le sous-estimer. Peut-on alors penser et réaliser une ville plus inclusive et bienveillante pour les femmes ?

La danse peut déconditionner collectivement la place des un.e.s et des autres dans l’espace public dans une démarche de type « slow walk » comme le propose la chorégraphe Anne Teresa De Keersmaeker avec des danseurs-marcheurs, et non une danse performance. Réinterroger la danse comme espace de mixité pourrait ainsi favoriser une ville plus égalitaire. Cette danse « inclusive » est un outil pour aller à la rencontre de l’autre et pour favoriser l’appréciation de la différence et réinventer la construction des espaces publics.

L’espace pour le danseur comme pour l’architecte, n’est pas neutre ; pour l’un, il est à occuper, traverser, habiter, modifier ; pour l’autre ces actions se font et se donnent à voir dans une chorégraphie.

La diversité et l’inclusion se révèlent constamment accélérateurs de création et d’innovation dans tous les domaines, et pourraient faire levier d’une nouvelle fabrique urbaine.

Le choix des matériaux constitue une étape stratégique dans l’élaboration des projets urbains. La conception d’espaces publics doit permettre de renforcer l’identité de la ville par la prise en compte du contexte, urbain comme paysager, et elle doit favoriser une utilisation simple et intuitive de celui-ci. Les matériaux doivent s’adapter à toutes les pratiques et mouvements : danser, marcher, skater, courir, se poser, jouer…

Les habitants et leurs usages sont des éléments fondamentaux au moment de la définition du projet. Traduire une meilleure prise en compte des relations entre l’espace public, les déplacements et les pratiques des usagers est un élément essentiel de notre démarche. S’interroger sur la composition de l’espace, les matériaux, la répétition, le mouvement, les usages, nous permet d’inventer ces « espaces à danser ».

C’est en conjuguant les échelles de nos interventions, du meuble à la ville, que nous pouvons développer cette stratégie d’inclusivité.

Photo : Anne Teresa De Keersmaeker

DES INTÉRACTIONS ENTRE LE CORPS ET LA VILLE POUR UNE ÉGALITÉ PLUS AFFIRMÉE

Dans nos projets, nous proposons d’inventer des formes collectives d’espaces publics à travers la danse comme moyen social pour préfigurer de nouveaux usages de la ville et pour sensibiliser les habitants. L’objectif est de corréler la marche chorégraphique et celle de l’architecte pour inviter les participant·e·s de tous âges à redécouvrir leur ville. La danse «slow walk» permet à tous de prendre connaissance du territoire et de le pratiquer, en notant les principales contraintes, les atouts et les bâtiments singuliers, tout en prenant part à la performance artistique. Tous les habitants peuvent participer et y trouver librement leur place pour partager la ville et la rendre plus interactive.

Cette pratique inédite est un prétexte pour travailler avec les habitants. À l’instar du duo chorégraphe et architecte Frederic Flamand et Thom Mayne, nous étudions l’interaction entre l’architecture (la ville) et les corps des citadins ou ruraux, comme vecteur de transformations de l’un et des autres. Nous assumons la ville comme un système dynamique fait de tensions, de conflits, de rupture mais aussi de désir, elle permet au chorégraphe de parler et de donner à voir le «corps vivant dans la cité». Là encore, la liaison entre architecture et danse n’est pas que de circonstance, il s’agit bien d’interroger à travers ces deux domaines son rapport au monde dans l’articulation entre le corps et la ville pour une égalité plus affirmée.

Photo : Anne Van Aerschot

LA GRAMMAIRE DES GESTES

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